Vahiné Fierro, la nouvelle vague du surf français

Interview

Vahiné Fierro, la nouvelle vague du surf français

Le surf, voilà une discipline qui nous fait voyager et qui sent bon les vacances. Mais pour certains, c'est un métier à part entière qui nécessite du talent mais également une bonne dose de travail !

La France du surf connaît Jérémy Florès, Johanne Defay et à une moindre mesure Michel Bourez…mais bientôt, c’est bien de Vahiné Fierro que l’on devrait entendre parler. En effet, la jeune Tahitienne de 20 ans évolue en « Qualifying Series », à savoir la division 2 du championnat du monde de surf, et n’en finit pas d’impressionner. Aux portes de la « Word Surf League », Vahiné représente fièrement les couleurs de la France et aussi de Tahiti, son pays de coeur. Alors que la jeune surfeuse va tenter de se qualifier pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020 et donc s’offrir un potentiel bol de notoriété, Beside Sport vous fait découvrir la nouvelle vague du surf français !

Vahiné, peux-tu te présenter ? Ton âge ? Où es-tu née ? Ton palmarès ?

Je m’appelle Vahiné Fierro, je viens d’avoir 20 ans, je suis originaire de Huahiné, une île à 30 minutes d’avion de l’île principale de Tahiti. J’ai débuté le surf à l’âge de 5 ans et concernant mes résultats jusqu’à présent, je suis notamment championne du monde junior en 2018 et j’ai été vice-championne du monde en 2016. Et j’ai  également remporté le « plus beau tube de l’année « pour la première fois dans l’histoire du surf féminin le 5 décembre 2019. Voilà les plus belles lignes de mon palmarès !

Beside Sport - Vahiné Fierro, la nouvelle vague du surf français -  -

Peux-tu nous parler de ta famille ? Parents ? Frères et sœurs ?

Mon père est Américain et ma mère est Tahitienne de Huahiné donc je suis à moitié américaine et à moitié tahitienne…mais j’ai également du sang mexicain car mon père est à moitié mexicain. J’ai deux passeports, un français et un américain. Quand l’on vit sur une île, on est entouré par la mer donc forcément tu finis par pratiquer un sport nautique et du coup, ils m’ont appris à surfer. J’ai adoré cela et mes deux petites soeurs s’y sont mises aussi. Pour ma part, la meilleure chose qui me soit arrivée, c’est de partager ma passion avec ma famille. Mes deux soeurs commencent les compétitions locales et sont également sponsorisées par Roxy. Forcément, j’essaie d’être le meilleur exemple pour elles !

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Cheerssss ! It’s the weekend 🥥🥥🥥 @heimiti.fierro @kohaifierro2

Une publication partagée par @ vahinefierro le

Tahiti représente quoi pour toi  ?

Tahiti, c’est l’endroit où j’ai grandi et c’est l’endroit que je préfère dans le monde. Honnêtement, j’ai voyagé un peu partout et je n’arrive à rien trouver de semblable à ce que je connais à Tahiti. C’est un lieu où je peux me recharger et celui-ci n’est pas pollué par tous les bruits de la civilisation. C’est quelque part un peu retiré du monde et on arrive à saisir le monde pour ce qu’il est vraiment. Le stress est inexistant là-bas et c’est tout simplement magique.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Aqua dream 🚺🍬 • It’s nice to be homeeee … @roxy photo : @petolefilms

Une publication partagée par @ vahinefierro le

Comment vis-tu le fait d’être en métropole ?

Quand j’ai commencé à voyager, je n’ai pas du tout aimé cela et cela m’a presque freiné dans la pratique à haut niveau du surf. Puis, j’ai appris à voir cela d’une autre manière donc je m’y fais mais après plus d’une journée, c’est très difficile pour moi.

Que signifie « Vahiné » en tahitien ?

Cela veut dire « femme » en tahitien et c’est même dans le dictionnaire français.

Le surf représente quoi pour une tahitienne en général et pour toi plus particulièrement ?

Le surf est une discipline qui est née à Tahiti et à Hawaï donc c’est un peu notre sport national. A Tahiti, il n’y a pas beaucoup de filles de mon âge qui font de la compétition à mon niveau. Dans la nouvelle génération, on voit plus de pratiquantes et j’en suis très heureuse. Je pense qu’avant les filles n’étaient pas encouragées à faire du surf.

C’est un sport cher et peu de personnes à Tahiti peuvent se payer une planche, des maillots de bain, des accessoires, et on peut imaginer que c’était plutôt le garçon qui avait le privilège de pratiquer cette discipline. De plus, à l’époque dans la culture tahitienne, c’était plutôt l’homme qui prenait les risques ou encore qui allait à la chasse pendant que la femme s’occupait des enfants et restait à la maison. Cette mentalité existe encore un peu mais cela est train d’évoluer significativement.

Quel genre d’élève étais-tu ? 

Sur mon île, il n’y a pas de lycée. Du coup, à l’âge de 14 ans, j’ai dû choisir de faire l’école à la maison sur mon île ou alors partir sur l’île principale et vivre à l’internat. Cela voulait dire 5 jours par semaine sur place, les weekends dans ma famille ou chez des amis et enfin toutes les 5 semaines, 1 semaine en vacances chez moi à Huahiné. J’ai décidé d’aller à Tahiti car je voulais faire de la compétition et sur mon île, il n’y a pas de plages pour surfer, il n’y a que du récif.

Mes parents ont toujours privilégié l’école au surf. Forcément, plus jeune, je ne pensais qu’à m’amuser et à aller surfer mais au fil des années, j’ai compris qu’il était important d’avoir quelque chose dans la tête. Je savais que cela m’aiderait même dans ma pratique du surf donc je me suis appliquée à l’école et j’ai eu mon Bac ES. Ensuite, j’ai essayé de faire des études en ligne pour avoir une licence d’anglais mais je n’ai fait qu’un mois car le surf devenait trop présent dans ma vie. Le seul moment où je pouvais travailler, c’était la nuit mais le sommeil est trop important pour un athlète de haut niveau pour le négliger. J’ai choisi le surf mais si jamais cela devait s’arrêter pour quelques raisons que ce soient, je reprendrais mes études avec plaisir.

« S'il y avait eu option "surf" au bac, j'aurais eu beaucoup plus de points (rires) »

Vahiné Fierro

Tweet this

Pratique t-on le surf à l’école à Tahiti ?

Non (rires) ! Il y avait une option « surf » au bac mais l’année où je l’ai passé, ils l’ont annulé car il n’y avait pas assez de surfeurs mais surtout des rameurs en pirogue. Et du coup, ils ont choisi de faire une option « pirogue » car c’est une discipline moins onéreuse et donc plus de gens à Tahiti pratiquent ce sport.

Tu es aujourd’hui sur l’équivalent de la deuxième division du circuit mondial. Quelle est la grosse différence avec l’élite du surf ?

Ils ne sont pas forcément meilleurs mais déjà plus âgés donc ils ont plus d’expérience et plus de maturité au niveau de leur surf. Et puis, pour arriver sur la « World Surf League », il faut passer par les « Qualifying Series ». Aujourd’hui, c’est mon objectif de rejoindre l’élite du surf. Il n’y a qu’une fille de mon âge qui est en WSL et la plupart ont 28-30 ans. L’année dernière, je suis passée, à deux séries près, de me qualifier et j’étais très déçue. Mais avec le recul, je me suis dis que je n’étais sûrement pas prête dans ma vie et j’ai pris cela comme un challenge. Pour l’instant, cela a bien débuté avec une deuxième place lors de ma première compétition et j’ai également une chance de me qualifier aux JO de Tokyo en 2020. Pour représenter la France aux Jeux Olympiques, je devrais finir dans les 6 premières lors du championnat du monde amateur qui aura lieu en mai.

Quelles sont les qualités de la surfeuse Vahiné Fierro ?

Souvent, les commentateurs disent que j’ai un joli style et que je suis agréable à regarder. Les juges apprécient le « flow » que je peux dégager. Ensuite, on dit que je suis puissante.

Que représente pour toi Jérémy Flores et Johanne Defay  ?

J’ai toujours été une énorme fan de Jérémy mais également de Johanne et Michel Bourez. Le dernier cité est ma principale source de motivation car c’est le seul tahitien sur la WSL et j’aimerais bien être la première femme de Tahiti à intégrer le circuit professionnel. Jérémy et Johanne, ils sont doués dans toutes les conditions, que cela soit dans les tubes, dans les « air » et j’admire énormément leur détermination et leur passion pour le surf.

« J'ai eu la chance de faire un championnat du monde amateur avec eux en octobre 2019 et ils étaient à fond derrière moi, ils me donnaient des conseils donc ce sont vraiment de bonnes personnes.  »

Vahiné Fierro

Tweet this

Beside Sport - Vahiné Fierro, la nouvelle vague du surf français -  -

Quel est ton modèle dans le surf actuellement ou dans l’histoire ?

Ma surfeuse préférée, c’est l’australienne Stephanie Gilmore. Elle est 7 fois championne du monde et elle est également chez Roxy, mon sponsor. Je la connais personnellement et j’ai eu l’occasion de surfer plusieurs fois avec elle…je suis sa plus grande fan. J’espère un jour surfer comme elle !

Pouvoir surfer pour la France aux JO 2024 à domicile sur la vague de Teahupo’o, cela te donne envie ?

J’espère que d’ici 2024, je serai sur le circuit professionnel et que je me qualifierai via cela et non pas via les petites étapes. Je n’étais pas surprise que Tahiti soit choisie pour l’épreuve de surf car les conditions en France sont mauvaises en juillet, il n’y a tout simplement pas de vagues. Alors qu’à Tahiti, ce sont les conditions idéales avec une belle houle et puis l’énergie est tellement différente. On est en maillot de bain, on est sur les bateaux, il y a les montagnes derrière et on a le « Mana ». C’est une énergie que l’on ressent à Tahiti et même les membres du CIO l’ont tout de suite remarquée lors de leur visite sur l’île. On peut également la ressentir à Hawaï. Et puis, c’est l’endroit où le surf est né donc je suis sûr que cela va être une compétition magnifique avec de belles images et qui marquera les JO de Paris.

Si tu devais choisir entre un titre mondial et un titre olympique en 2024, tu prendrais quoi ?

Whaou, ça c’est dur (rires) ! En 2024, seulement cette année-là, les JO sinon les autres années, le titre mondial.

Aujourd’hui, tu représentes la France ou Tahiti ?

L’année dernière, Michel et moi, on a décidé de s’affilier à la Fédération Française pour pouvoir concourir sous le drapeau français. Néanmoins, les Tahitiens sont très fiers et du coup, je pense que je mettrai plus Tahiti en avant si je remporte une grande compétition.

Au niveau sponsoring, est-ce facile pour une jeune surfeuse de ton niveau ?

C’est extrêmement difficile de nos jours d’avoir des sponsors. Les marques ne sont pas dans leurs meilleures périodes économiques et notamment les marques de surf. Par exemple, Hurley a décidé de ne pas renouveler les contrats de ses athlètes qui prenaient fin cette année. C’est pour cela que je suis très fière et très contente d’avoir un partenaire comme Roxy avec qui j’espère encore rester de nombreuses années. Pour moi, c’est comme une famille !

 

Voir cette publication sur Instagram

 

Had a fun five days at home / Off to bonjour bonsoir bisoussss land 🇫🇷🇫🇷 @roxy

Une publication partagée par @ vahinefierro le

Que penses-tu du fait que certaines mannequins qui surfent correctement séduisent les marques de surf plutôt que les surfeuses professionnelles ?

Dans le monde du surf, l’esthétisme est très important et c’est sûr que nous, les surfeuses, nous sommes assez baraquées et avons une silhouette différente. Nous n’avons pas un corps de mannequin et parfois les marques privilégient l’esthétique à la performance. C’est pour cela qu’ils vont prendre des filles qui surfent, qui sont très très belles et cela va permettre aux marques de vendre plus qu’une athlète qui est plus développée.

 

Voir cette publication sur Instagram

 

🐢🐢🐢

Une publication partagée par Imogen Caldwell (@imogencaldwell) le

Pour ma part, j’ai la chance d’être un peu entre les deux, pas énorme mais pas toute fine, mais Roxy est top avec cela et ne nous met pas la pression à ce niveau-là. Je sais que certaines marques mettent la pression sur leurs athlètes afin qu’elles gardent leur poids de forme pour les shooting photo.

Quel est ton rapport à ton image et à ton compte Instagram ?

Je pense que les réseaux sociaux de nos jours, c’est quelque chose de très important. Ce n’est pas forcément mauvais car cela permet de communiquer avec d’autres personnes et de partager ce que tu vis. Quand tu es un athlète, les gens sont curieux de voir ton quotidien et tes performances donc c’est primordial que l’on se mette en avant sur les réseaux sociaux.

De mon côté, mes parents m’ont toujours appris à garder une certaine distance et à ne surtout pas vivre à travers les réseaux sociaux. Ils ont raison car ce n’est pas très sain et surtout ce n’est jamais la vraie vie. Du coup, je mets ce qu’il me plaît, ce que j’ai envie de partager et pas forcément tout ce que je fais dans ma vie.

Article suivant

«
BS

Souhaitez vous recevoir des notifications ?

Non merci Oui
X

Vous etes actuellement hors ligne